“J’avais envie de mélanger sciences dures et sciences sociales”, Marie – ingé d’avenir

“J’avais envie de mélanger sciences dures et sciences sociales”, Marie – ingé d’avenir

Du manifeste Pour un Réveil Écologique aux prises de parole récentes des étudiants d’AgroParisTech ou de Polytechnique, les ingénieur·e·s sont conscients et préoccupés par les enjeux de la redirection écologique et solidaire, qu’ils sont 70% à considérer comme l’enjeu majeur d’aujourd’hui. Pour passer du constat à l’action, la plateforme jobs that makesense – premier site d’emploi et de formations à impact positif – lance l’initiative Ingés d’Avenir en partenariat avec l’ADEME, le BNEI, le Réseau Action Climat, Pour un Réveil Écologique, l’APEC et Latitudes : des offres d’emploi et de formation d’ingénieur dans la transition écologique, des événements et contenus pour s’informer et s’orienter. Parmi ces contenus, des portraits d’ingénieurs ayant sauté le pas pour embrasser une carrière à impact positif.

 

En tant qu’ingénieur.e, il y a parfois ce constat, voire ce regret, d’être uniquement un agent du “techno-solutionnisme”. Olivier Lefebvre, auteur du livre Lettre aux ingénieurs qui doutent, exprimait dans cette interview réalisée pour jobs that makesense, cette frustration d’être concentré sur la technique, sans prendre de recul sur les dimensions sociétales de son métier. En gros, en agissant, sans comprendre le “pourquoi on fait ce qu’on fait ?” Pour Marie, dès l’école d’ingénieur, il lui fallait avoir un cursus qui intégrait les sciences sociales. C’est via un double diplôme qu’elle parvient à trouver cet équilibre. Elle obtient alors des compétences, qui lui permettront dès la sortie d’études, de s’orienter vers des métiers mêlant la technique aux enjeux sociaux et environnementaux. Elle en parle…

 

Lycée, prépa, école d’ingénieur

Au lycée, Marie aimait bien les sciences et avait de bonnes notes. Deux bonnes raisons de continuer dans cette voie ! Préparer des concours pour entrer en école d’art après le lycée, était aussi quelque chose qu’elle envisageait, mais elle n’a pas osé. “J’avais trop peur de la précarité et je n’avais pas d’exemples autour de moi pour me rassurer et m’engager dans cette voie. Donc je fais une prépa maths, avec conviction.” En entrant en prépa, elle sait que c’est pour poursuivre en école d’ingénieur et à une idée de cursus bien précis en tête : “intégrer une école d’ingénieur et suivre en parallèle un double diplôme avec Sciences Po.” Elle précise que son choix était dès les études, de “mélanger sciences dures et sciences sociales.” Elle intègre après la prépa L’École Nationale des Ponts et Chaussées, à Paris. Au sein de cette école, elle suit au départ un cursus généraliste principalement constitué de cours de maths et physique, puis se spécialise en économie. Lors de sa dernière année d’étude, elle bénéficie d’un accord de double diplôme entre son école d’ingénieur et Sciences Po et suit alors un Master en politiques publiques. 

 

3 Stages stimulants dans le secteur public

En école, elle fait quelques stages : l’un à l’Arcep, une autorité administrative indépendante. “J’ai travaillé sur la mise en œuvre d’une politique publique qui vise à déployer la fibre dans les zones moins denses. Je faisais de la mise en œuvre au quotidien et je travaillais sur les négociations européennes en même temps.”

Puis elle intègre France Stratégie, pour 6 mois, un service du Premier Ministre, faisant de la prospective et de l’évaluation des politiques publiques.“Je travaille sur plusieurs sujets, dont le séminaire Soutenabilités.” Ce séminaire au long court visait à repenser l’action publique au prisme de la soutenabilité forte, c’est-à-dire en considérant qu’une perte de capital naturel (ensemble des ressources naturelles) ne peut être compensée par une augmentation du capital économique. Lors de la préparation des premiers évènements du séminaire elle rencontre notamment des chercheurs et experts de toutes disciplines passionnantes !

Et enfin, son dernier stage était à la DGE, la Direction Générale des Entreprises. Au sein de cette direction de l’administration publique française, elle est chargée de mode durable, notamment de l’accompagnement de la filière lin et chanvre française.

 

Un poste récent à l’Office Français de la Biodiversité

Aujourd’hui Marie travaille à l’OFB, Office Français de la Biodiversité. Elle est responsable administrative et financière d’un projet européen auquel participe l’OFB. “Ce qui est cool c’est que quand tu es ingénieur.e, tu aimes résoudre des problèmes, et là tu as un gros “problème” à résoudre qui est d’utiliser une subvention européenne prévue pour un projet très ambitieux en respectant les règles administratives internes et les exigences de la Commission Européenne. Pour Marie, mettre en place toutes les démarches, les suivis et les flux d’informations tout en respectant l’ensemble des contraintes et en expliquant les démarches à tous les agents, services et directions impliquées “est un très chouette défi !” 

 

Lire plus : Réseaux sociaux : les alliés incontournables des ingénieurs

 

Ce que lui ont apporté le double cursus sciences politiques x école d’ingénieur

#1 L’ouverture d’esprit

#2 La prise de recul : “Quand je fais telle ou telle chose, je vais regarder quelles sont les différentes visions de différents auteurs, pour me positionner. Dans le fond, ce que je fais, ça veut dire quoi ? C’est un réflexe que m’a apporté Sciences Po. Et si je n’ai pas le temps d’aller explorer les théories, je me pose au moins des questions.”

#3  La prise en compte des externalités dans ses actions : “je me demande aussi quels sont les impacts de la technique sur la société ou l’environnement et sur la manière dont on peut imaginer des technologies vraiment souhaitables pour le futur.”

“Pour l’instant on a fait ces études là, il faut s’en servir, on essaye de faire les missions qui vont avoir le plus grand impact sociétal possible. »

 

“Avoir le plus grand impact sociétal possible”

En questionnant Marie sur son sentiment d’impact dans son travail, elle admet que parfois les lenteurs peuvent être frustrantes : “quand je bossais dans la mode durable, des fois c’etait un peu frustrant de voir que ça n’allait pas assez vite, j’avais envie d’être dans le Faire. Mais c’était le jeu. Toute avancée était déjà une victoire” A l’OFB, en tout cas, elle ne se sent pas en dissonance. Quand elle discute avec certains de ses potes ingénieurs, ce qu’ils se disent c’est : “pour l’instant on a fait ses études là, il faut s’en servir, on essaye de faire les missions qui vont avoir le plus grand impact sociétal possible, et si un jour, on sent que ça ne fonctionne plus suffisamment, on fera autre chose.” Ils sont d’ailleurs nombreux à avoir choisi ce cursus pour fabriquer des choses ou imaginer la manière dont elles sont fabriquées et pourraient un jour avoir un métier plus concret dans “le faire”. 

 

Et après ? 

Marie pense à quelques idées pour ses prochaines aventures professionnelles : “ce qui m’intéresse aussi, c’est de mettre en place des pratiques plus soutenables dans le secteur culturel, car je fais un peu de théâtre. Sinon, du conseil environnemental aux entreprises qui veulent vraiment essayer de faire mieux.” Au-delà de professions purement intellectuelles, ce qui lui manque aujourd’hui c’est de fabriquer des choses : “Même si je couds chez moi en rentrant, ça ne suffit pas. Mixer travail intellectuel et manuel serait l’idéal. “Avoir divisé autant le travail, c’est complètement dé-corrélé avec notre fonctionnement d’humain je pense” dit-elle. Être moins souvent sur les écrans, serait aussi pour elle plus agréable. Qui sait ? 

 

👉 Retrouvez toutes les offres d’emploi, des témoignages, formations et articles inspirants sur ingesdavenir.org

 

Lire plus : “Combiner sens et salaire, c’est possible” Lucas Mirgalet – ingé d’avenir