- AUDENCIA INTERVIEWS SÉLECTION
- Maxime Diguet
- 16 juillet 2024
Étudiants-entrepreneurs à Audencia et INSA Lyon, ils se lancent dans « HOUSE OF MACRAMÉ »
Rencontre avec Dishant Ranganathan (Inde) et Dhvani Mehta (Audencia Nantes), qui nous explique leur parcours et leur concept unique « HOUSE OF MACRAMÉ »
Pourriez-vous vous présenter ?
Dishant : Bonjour, je m’appelle Dishant Ranganathan, j’ai 23 ans et je suis originaire de Nantes. Je suis actuellement en dernière année d’école d’ingénieur à l’INSA Lyon en filière entrepreneuriale après avoir fait génie mécanique.
Dhvani : Et moi c’est Dhvani Mehta, j’ai 25 ans, je viens du Rajasthan en Inde et je suis étudiante en finance à Audencia Nantes. Avant cela, j’avais étudié les beaux-arts à Nantes également.
Lire plus : Interview d’Oriane Dintrans, Directrice Opérations chez Abenex
House of Macramé en quelques mots, c’est quoi ?
Dishant : Émanciper les femmes dans les zones rurales indiennes via l’artisanat de macramé.
Dhvani : Oui, en fait, nous sommes une entreprise se concentrant sur des produits en macramé de haute qualité et élégants, tels que des attrape-rêves, des sacs à main, et d’autres articles, tous faits à la main par le travail minutieux de femmes défavorisées en Inde.
Mais le macramé, ça consiste à quoi au juste ?
Dishant : C’est une technique de création textile qui consiste à nouer des fils de coton à la main pour réaliser des motifs décoratifs, comme des supports de plantes, des sacs, des rideaux… Les possibilités sont vastes.
Quelles sont les inspirations derrière House of Macramé et comment l’idée a vu le jour ?
Dhvani : Étant originaire de la petite ville de Banswara au Rajasthan, nous y sommes retournés en 2021 et avons vu les conditions désastreuses des femmes dans les zones rurales indiennes. Elles travaillent énormément sans garantie de salaire, ce qui entraîne de nombreux litiges et injustices. Elles ne peuvent pas participer aux décisions familiales et sont souvent discriminées.
Dishant : Mais dans cette même ville, avec une spécialiste, nous avons découvert l’art du macramé, un artisanat traditionnel indien. C’est là que nous avons eu une idée : pourquoi ne pas apprendre à ces femmes très manuelles l’art du macramé, créer quelques produits, et essayer de les vendre pour les aider financièrement ? C’est ce que nous avons fait et ce fut un grand succès qui nous a permis de créer House of Macramé. En B2C, nous nous sommes très vite développés en Inde avec nos sacs et nos décorations, et plusieurs revendeurs d’artisanat ont décidé de collaborer avec nous, ce qui nous a permis de croître rapidement.
Comment arrivez-vous à apporter une aide à ces femmes défavorisées ?
Dhvani : Eh bien, nous les formons à l’art du macramé puis les recrutons en CDI sous 35 heures avec un salaire fixe au-dessus du salaire médian. Cela les aide à s’émanciper et à devenir indépendantes financièrement. Certaines ont subi des violences conjugales et, grâce au projet, elles ont pu quitter leur environnement toxique pour s’installer en ville et travailler. Cela représente l’essence même de ce que nous essayons de faire : contrer les injustices envers les femmes dans les zones rurales indiennes.
Dishant : Aujourd’hui, nous avons une équipe de 8 femmes en CDI en Inde, supervisées par notre troisième fondatrice, Priti Mehta.
Initialement lancé en Inde, vous avez développé le projet en France : quelles sont les différences entre ces deux marchés ?
Dhvani : Oui, pour accroître notre impact en recrutant plus de femmes en Inde, nous voulions nous implanter en France.
Dishant : Pour pouvoir s’insérer et s’imposer sur le marché indien, il fallait vraiment produire des macramés de qualité premium avec des finitions élégantes. De plus, il faut répondre aux demandes des clients sur beaucoup de produits personnalisés et donc être réactif dans la création de nouveaux designs. En France, les gens viennent vers nous pour la beauté visuelle de nos produits, mais ce n’est pas seulement la qualité qui nous différencie, c’est aussi et surtout notre impact social. Les personnes de plus en plus conscientes des enjeux de notre société s’intéressent aux marques éthiques avec des valeurs sociales et environnementales. C’est par ce biais que nous nous sommes fait notre place en France.
Quels ont été les plus grands défis rencontrés en lançant House of Macramé ?
Dhvani : Notre plus grand défi était de maintenir notre engagement social même lorsque les choses allaient moins bien. En effet, nous nous étions engagés à aider 8 femmes, ce qui nous mettait la pression de générer un chiffre d’affaires suffisant pour pouvoir les rémunérer, même pendant les mois difficiles. Cela nous a obligés à travailler avec beaucoup de rigueur et de discipline, car nous devions remplir notre mission, peu importe les résultats.
Dishant : L’autre défi était de ne pas répliquer ce qui nous a permis de réussir en Inde sur le marché français. Nous devions adapter notre approche pour répondre aux attentes spécifiques du marché français. Par exemple, en Inde, nous utilisions beaucoup Instagram pour nous faire connaître et le site était seulement un catalogue de produits. Mais ici, un site fonctionnel et bien référencé est super important. Nous avons donc dû monter en compétences rapidement sur le Ux design et le SEO pour nous adapter.
Qu’est-ce qui fait la force de votre binôme aux compétences transverses entre la Grande École de Management (Audencia) et d’ingénieurs (INSA Lyon) ?
Dishant : La force de notre binôme réside dans la complémentarité de nos compétences. Dhvani apporte une expertise cruciale en gestion et finance, assurant la stratégie d’entreprise, la trésorerie, et la structure financière. Elle gère les bilans, les marges et la gestion des salaires. De mon côté, j’apporte une approche technique et analytique grâce à ma formation d’ingénieur. Je suis responsable de la logistique et des aspects commerciaux, y compris les négociations avec les fournisseurs et les partenaires, ainsi que la mise en place de tableaux d’analyse sur nos ventes et nos publicités. J’agis un peu tel un ingénieur d’affaires au sein de ma propre entreprise. Ensemble, nous combinons nos forces pour optimiser nos processus et innover constamment.
Dhvani : Oui, notre complémentarité nous permet de couvrir tous les aspects de la gestion de notre entreprise. Cette synergie est essentielle pour surmonter les défis et saisir les opportunités de manière efficace.
Comment parvenez-vous à gérer votre temps entre vos études et le développement de ce projet entrepreneurial ?
Dhvani : La gestion du temps est un défi constant. Nous devons être très organisés et disciplinés. Nous utilisons des outils de gestion de projet tel que notion pour suivre nos tâches et nos progrès. Chacun de nous consacre un certain nombre d’heures par semaine à House of Macramé, tout en s’assurant de ne pas négliger nos études.
Quels conseils donneriez-vous aux étudiants qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat pendant leurs études ?
Dishant : Mon conseil principal serait de bien s’entourer et de parler de votre projet autour de vous. L’entrepreneuriat peut être isolant, et il est facile de se sentir seul face aux défis. En partageant votre vision et en cherchant du soutien, que ce soit auprès de mentors, de collègues étudiants ou de réseaux d’entrepreneurs, vous pouvez bénéficier de conseils précieux et d’un soutien moral. Il est important de ne pas rester isolé.
Dhvani : Soyez fier de votre parcours entrepreneurial. Parfois, avec les études, les choses n’avancent pas aussi vite que vous le souhaiteriez. Mais n’oubliez pas que se lancer dans l’entrepreneuriat en parallèle de ses études est déjà un acte de courage immense. Prenez du recul pour réaliser ce que vous avez déjà accompli et soyez moins dur avec vous-même. Reconnaissez la valeur de votre démarche et les compétences que vous développez en chemin. Audencia valorise beaucoup l’artisanat et les causes sociales ce qui me donne la confiance de continuer.
Quels sont les projets futurs pour House of Macramé ? Avez-vous des idées de diversification ou de nouveaux produits en préparation ?
Dishant : Nous prévoyons de déployer un service de location de sets de macramé pour des événements tels que des mariages. Nous l’avons déjà fait en Inde et en Italie, et ce fut un grand succès. En plus, cela évite le coût environnemental de la création de nouveaux produits. Nous allons donc contacter des wedding planners et commencer à mettre en place ce service de location. Je suis convaincu que ça va marcher !
Dhvani : Nous allons également nous concentrer davantage sur les marchés et salons. Nos produits sont très visuels, et cela nous permet d’échanger avec les personnes sur notre mission. Pour les Lyonnais, vous pouvez nous retrouver les 28 et 29 septembre 2024 au marché Autrement sur la place Foch !
Enfin, comment vois-tu l’évolution de House of Macramé à long terme, et quels sont tes objectifs principaux pour ce projet ?
Dishant : Nous visons à aider à l’émancipation de plus de femmes défavorisées en Inde. Notre objectif est d’atteindre 200 femmes dans nos locaux d’ici 2026. Pour y parvenir, nous souhaitons établir 5 partenariats B2B2C en France, notamment avec des grands groupes tels que Maisons du Monde ou Nature & Découvertes.
Dhvani : Nous avons également pour ambition de développer le B2C avec une communication fun et authentique sur les réseaux sociaux et d’implémenter notre offre de locations de sets. L’idée est vraiment de se développer sur le marché français et européen, tout en augmentant notre engagement social en Inde. Nous n’avons aucun doute que lorsqu’on se bat pour une mission avec de beaux produits, ça va marcher. J’espère montrer qu’on peut être jeune et tout de même avoir un impact positif sur la société.
Pour les suivre, n’hésitez pas à aller voir leur :
Lire plus : Slingshot : la plateforme pour découvrir les salaires des entreprises