- ACTU BUSINESS
- Auriane Ducherpozat
- 23 octobre 2024
Opella : un enjeu de souveraineté sanitaire au cœur des négociations
On en parle de toutes parts : Sanofi va céder 50 % de sa filiale Opella, propriétaire du célèbre Doliprane, à CD&R, un fonds d’investissement américain. Cette opération suscite de vives réactions, car elle touche à la souveraineté sanitaire et au maintient de l’emploie en France. Face à ces enjeux, le gouvernement français, via Bpifrance, a décidé d’intervenir pour protéger l’emploi et assurer la production locale de médicaments essentiels. Découvre les details de ce deal ainsi que les enjeux qu’il soulève dans cet article !
Comprendre le deal
Le 11 octobre dernier, Sanofi est entré en négociations exclusives avec Clayton Dubilier & Rice (CD&R). L’objectif est de céder 50 % d’Opella, sa division de santé grand public comprenant des médicaments comme le Doliprane. Opella est valorisée à 15,5 Mds€, soit environ 12 fois son résultat opérationnel.
Mais, le 21 octobre dernier l’État a annoncé la signature d’un accord tripartite entre Sanofi, CD&R er la BPI. Via Bpifrance, l’Etat devrait lui aussi entrer au capital à hauteur de 2 %, investissant entre 100 et 150 M€. Cet investissement lui garanti ainsi d’une part un siège au conseil d’administration, et lui permet d’autre part d’obtenir les garantit suivantes :
- La pérennité des sites de production à Lisieux et Compiègne
- Le maintien du siège et des activités de R&D en France
- La protection de l’emploi sur le territoire
- Un investissement de 70m€ en France sur les 5 prochaines années
- Le maintien des volumes minimaux de production pour les produits sensibles d’Opella, tels que le Doliprane, Lanzor et Aspegic
- L’approvisionnement auprès de fournisseurs français
Cet accord tripartite vise à préserver l’indépendance de la production des médicaments essentiels en France. Il permet également à Sanofi de conserver une position stratégique dans la gestion d’Opella.
Les motivations de Sanofi de céder 50% du capital d’Opella
En se délestant d’une partie du capital d’Opella, Sanofi cherche à recentrer sa stratégie sur des segments à plus forte croissance, notamment la biopharma, qui comprend les médicaments et vaccins innovants. Le géant pharmaceutique souhaite ainsi se défaire d’une filiale qu’il considère comme non stratégique tout en bénéficiant de la future croissance d’Opella grâce à un partenaire financier. L’objectif est également de dégager des fonds pour rémunérer ses actionnaires, qui estiment que leur retour sur investissement est insuffisant.
Il est important de souligner que cette opération vise la croissance, et non la restructuration. Sanofi conserve 50 % d’Opella, lui assurant un droit de veto sur les décisions stratégiques, notamment celles concernant l’ancrage français. La société voit cette scission comme une opportunité de créer un “champion mondial” de la santé grand public, basé en France.
Les motivations du gouvernement d’entrer au capital d’Opella
Le ministre de l’Économie, Antoine Armand, et le ministre délégué à l’Industrie, Marc Ferracci, ont insisté sur la nécessité de garantir le respect des engagements pris dans cet accord. Pour ce faire, l’État a obtenu une participation via Bpifrance, avec un siège et un droit de vote au conseil d’administration d’Opella. Cette décision permet à l’État d’être informé des stratégies à long terme et d’infléchir toute décision qui irait à l’encontre des intérêts sanitaires et industriels français.
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Les enjeux de souveraineté sanitaire
La souveraineté sanitaire est la capacité d’un pays à produire les médicaments essentiels pour sa population sans dépendre de l’étranger. Depuis le Covid-19, la France a pris conscience de sa dépendance vis-à-vis des chaînes d’approvisionnement mondiales. Le deal entre Sanofi et CD&R, impliquant un acteur américain, soulève ainsi des craintes sur l’avenir de la production locale du Doliprane. L’intervention de l’État via Bpifrance permet de sécuriser cette production sur le territoire national. Cela garantit l’approvisionnement français et devrait préserver les emplois.
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Les enjeux d’emplois en France
L’accord ne concerne pas uniquement la souveraineté sanitaire. Il soulève également la question du maintien de l’emploi en France. Avec l’entrée de CD&R, certains craignent que des suppressions d’emplois ou des délocalisations soient envisagées pour optimiser les coûts. C’est pourquoi le gouvernement a veillé à inclure des clauses strictes dans l’accord : une amende de 40 millions d’euros est prévue en cas d’arrêt de la production sur les sites de Lisieux et Compiègne, garantissant ainsi la protection des 700 salariés concernés.
En somme, ce deal stratégique permet à Sanofi de recentrer ses activités tout en garantissant que la production de médicaments essentiels reste ancrée en France. L’intervention de l’État, via Bpifrance, vise à préserver la souveraineté sanitaire et à protéger les emplois, tout en permettant à Sanofi de créer un champion mondial de la santé grand public. Cependant, l’équilibre entre intérêt économique et protection des actifs français reste délicat, et ce partenariat sera scruté de près dans les mois à venir.