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- Alix Portet
- 9 mai 2021
Rencontre avec Marie Lozay – Directrice du Pôle Industriels PGC chez Phénix (2/2)
Phénix devient un acteur majeur de la lutte contre le gaspillage alimentaire en permettant aux commerçants de revendre leurs invendus à des prix moindres sur l’application. Voici la deuxième partie de l’interview de Marie, directrice du Pôle Industriels PGC chez Phénix!
Vocabulaire de l’entreprise:
- P&L (Profit and Loss): façon de modéliser une affaire donnée afin de faire apparaître la marge qui peut être récupérée
- BU: Business Unit
- Test and learn: test au préalable d’une hypothèse et enseignements tirés de cette expérimentation
- GMS: Grandes et Moyennes Surfaces
Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre poste aujourd’hui ?
J’aime les possibilités offertes par la start-up, c’est-à-dire l’autonomie, l’innovation, le fait d’avoir les coudées franches. Chez Phénix, les équipes sont jeunes : chez Ferrero, je faisais partie des « jeunes »; chez Phénix je fais partie des « personnes expérimentées”.
L’environnement et l’ambiance sont différents, les équipes croient beaucoup dans la mission et sont super motivées, ce qui crée une forte dynamique. La culture collaborative y est aussi très forte. Il y a beaucoup d’idées, d’innovation, et surtout de bienveillance. Tout cela se fait avec une forte proximité avec les fondateurs, d’où une vraie culture de la transparence. Nous savons exactement ce qu’ils veulent faire, où ils veulent aller, où nous en sommes, … Les stagiaires ont quasiment accès au P&L de la boîte, et c’est d’ailleurs un levier de motivation que de comprendre pourquoi on fait les choses.
C’est très différent de ce que j’ai pu connaître dans les grands groupes, où la direction est beaucoup plus hiérarchique, verticale, et parfois orientée dans l’intérêt des dirigeants. Cela pouvait donner beaucoup d’inertie et de rigidité à l’entreprise.
Ce sont des questions de culture d’entreprise. Plus on change d’entreprise, plus on se rend compte que la culture d’entreprise est tangible et qu’elle nous impacte quotidiennement. Dans certaines entreprises, il y a différentes façons de communiquer, de s’exprimer, des codes, avec lesquels on est plus ou moins à l’aise. On s’en rend compte en testant les différentes cultures d’entreprise.
Pour revenir à votre question, ce qui me plait dans mon poste, c’est aussi d’avoir du sens. Quand un client dit : « J’ai un stock de 200 000 € de livres : soit vous m’aidez à le donner, soit je les détruis », forcément cela devient très concret. J’avais déjà travaillé avec Phénix, et je trouvais la start-up vraiment très attractive, j’écoutais souvent les podcasts de Jean Moreau (le CEO de Phénix, NDLR), et je trouvais ça top ! C’est très important pour moi d’avoir des managers inspirants, c’est le cas d’Amélie Dumont, ma boss, ex-Directrice de la stratégie de Coca-Cola.
Pensez-vous continuer à travailler dans ce business model de la start-up, ou avez-vous d’autres projets en tête pour la suite ?
Aujourd’hui, le monde de la start-up me convient bien, il me permet d’avoir un mode de vie équilibré, notamment avec ma vie familiale. C’est passionnant, c’est intense, mais en même temps on a l’agilité et l’autonomie qui permettent d’allier vie professionnelle et vie personnelle. J’aime ne pas être astreinte à des horaires de bureau. Parfois, je prends le train pour aller de Rouen à Paris, je démarre ma journée à 7h du matin dans le train, cela me convient très bien. En parallèle, je peux terminer ma journée à 5h si j’en ai le besoin.
La liberté et l’autonomie dans les start-ups n’ont pas de prix, et elles permettent de trouver un réel équilibre avec la vie personnelle, même si clairement, cela faisait longtemps que je n’avais pas autant travaillé! Il faut savoir que certains grands groupes font beaucoup de choses pour la parentalité. J’avais été contactée par beaucoup de grands groupes quand je suis partie de chez Ferrero. Ils proposaient des crèches d’entreprises, des animatrices pour garder les enfants au siège le mercredi, … Mais moi, j’avais besoin de plus de flexibilité vis-à-vis de mes enfants. En début de crise de la Covid, le télétravail et le mode « remote » n’étaient pas encore entrés dans les normes. J’aurais dû déménager à Paris, alors que pour l’instant, je suis bien en province.
Quelle a été votre vie associative à Kedge, et que vous a-t-elle apporté dans votre vie professionnelle ?
Avec le recul, je pense qu’il n’y a pas de hasard. J’étais dans l’association humanitaire de Kedge, Horizon. Nous avons monté un projet pour mettre en place un dispensaire au Togo. Cela avait du sens, et en même temps, il fallait se démener pour trouver des mécènes et des fonds afin de financer notre projet. Nous avons monté un business plan, nous avons dû aller chercher des fonds, donc il y avait une démarche financière et commerciale, en plus du côté humanitaire. Quand j’y repense, il y a des points communs avec ce que je fais aujourd’hui.
Quel est le profil des stagiaires et des alternants que vous recrutez ?
Ce sont surtout des personnes en sortie d’études qui deviennent chargés de projet, qui gèrent les relations entre les associations et les clients. Ils gèrent la partie opérationnelle du don et la partie commerciale. Ce sont des postes très formateurs, et c’est tout le côté grisant de la start-up. Chez Phenix, dans mon équipe, un chargé de projet de 25 ans peut avoir un secrétaire d’État au téléphone pour organiser la couverture médiatique d’un don, et négocier avec des DG, des directeurs marketing, des directeurs supply de grands groupes. Ils ont donc accès à un niveau de hiérarchie et de compétences qu’ils n’auraient pas s’ils étaient dans un grand groupe. Cela participe à les développer et à les motiver au quotidien.
De mon côté, venant de 15 ans de grands groupes, je me charge de former mes équipes sur ce qu’est un industriel, sur les différents panels, etc… Ils ne seront jamais aussi experts qu’un chef de produit qui s’occuperait de panels tous les jours dans un grand groupe, mais ils développent de l’agilité et des compétences transverses tous les jours. En effet, c’est important de parler le même langage que le client, pour comprendre leur fonctionnement et leurs enjeux.
D’habitude, les entreprises font intervenir des cabinets de formation en externe. En effet, dans certaines typologies de métiers dans les grands groupes, la progression est relativement linéaire (on commence chef de secteur, ensuite, on peut aller au marketing, ou dans le category management), codifiées, et normées. Ici, le poste de chargé de projet et sa formation n’existe pas. Il requiert des compétences commerciales, relationnelles, logistiques, financières, … Cette polyvalence ce n’est pas facile à acquérir via des modules de formation classique. Nous réalisons des formations en interne, ou en faisant appel à des intervenants extérieurs que nous allons chercher…chez nos clients!
Avez-vous des conseils pour des étudiants qui souhaiteraient avoir le même parcours que vous ?
Suivre son intuition! Et se poser les bonnes questions: où ai-je envie de vivre? Quels sont mes drivers de motivation? Qu’est-ce que m’apporte le grand groupe vs. la start-up?
Beaucoup de personnes sont attirées par les start-ups par le sens que peut donner la mission. C’est top, mais il faut aussi des personnes veiller à développer des compétences ‘lisibles’ sur le marché du travail. C’est possible de faire des stages dans des grands groupes et dans des start-ups pour découvrir les différentes cultures d’entreprise, les comparer….et se forger sa propre opinion.