
- ACTU BUSINESS ENTREPRENEURIAT INTERVIEWS
Elise Casado
- 23 février 2022
Interview de Nima Karimi : CEO et co-fondateur de Silvr, le leader européen du Revenue-Based Financing
Rencontre avec Nima Karimi, CEO et co-fondateur de Silvr. Découvrez son parcours et son ambition pour faire de Silvr une future licorne française !
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Bonjour Nima, peux-tu te présenter en quelques mots, nous parler de ton parcours ?
Passionné par la tech, j’ai fait mon stage de fin d’études dans une entreprise de conseil en sécurité informatique. J’ai toujours voulu être entrepreneur mais en arrivant à la fin de mon école d’ingé, j’ai réalisé qu’il me manquait de nombreuses compétences pour monter une boîte. Je n’avais jamais fait de marketing, de communication, de gestion, de comptabilité etc… J’ai décidé de compléter mon bagage tech par des connaissances business et j’ai intégré en 2007 le Master Spécialisé en Digital Business d’HEC. Suite à ça, j’ai créé ma première boîte à la sortie de l’école.
Peux-tu nous raconter rapidement tes différentes expériences dans l’entrepreneuriat et comment elles t’ont dirigé vers Silvr ?
En sortant de l’école en 2008, avec un ami d’HEC nous avons créé Kanelle Media, une entreprise de rencontre sur mobile dans laquelle j’occupais le rôle de CTO.
A l’époque, l’App store n’existait pas encore, c’était donc une vraie nouveauté. Nous voulions faire notre première levée de fonds en equity mais malheureusement nous avons mis trop de temps à répondre à l’unique investisseur intéressé par l’entreprise, qui a fini par nous lâcher à son tour.
Ce projet B2C extrêmement consommateur de cash et sans nouvel apport de capitaux propres n’était pas viable et nous avons dû pivoter.
Nous avons ainsi choisi de nous tourner vers du B2B et nous avons créé une plateforme de mobile gaming qui permettait à chacun de créer un jeu sur mobile en no code.
En 2 ans, nous avons réussi à déployer plusieurs centaines de jeux à travers l’Europe. Nous nous adressions principalement à des entreprises pour créer des jeux de team-building et des musées qui souhaitaient créer des parcours de visites interactifs. Mais le marché était trop petit et nous avons finalement décidé de vendre nos actifs à notre premier client, une agence de communication.
Suite à ces expériences entrepreneuriales et digitales, j’ai souhaité mettre à profit mes compétences et accompagner d’autres entreprises en créant en 2013 mon propre cabinet de conseil en transformation digitale, Digital & You. En 2018, nous étions parmi les 500 boîtes à la plus forte croissance en Europe classées par le Financial Times, et tout cela en autofinancement. Puis j’ai commencé à investir dans différentes entreprises en tant que Business Angel. C’est toutes ces expériences qui m’ont emmené à la création de Silvr en 2020.
Justement, Silvr propose une alternative aux levées de fonds classiques : le Revenue-Based Financing. Comment en es-tu arrivé là après tes premières expériences ?
Entrepreneur depuis une dizaine d’années, j’ai souvent été confronté aux problématiques de financement. Les entreprises du digital n’ont pas d’actifs en interne, ni de biens tangibles, ce qui fait que les banques se montrent récalcitrantes face à une demande de prêt. De l’autre côté, il y a l’equity mais qui, en réalité, ne concerne que très peu d’entreprises. Ce qui implique aussi de diluer son capital dans l’objectif de devenir une licorne, leader de son marché etc… ce qui n’est pas forcément le cas de tout entrepreneur. Je me suis alors posé la question « Comment peut-on faciliter l’accès au financement pour les entrepreneurs d’aujourd’hui ? » J’ai découvert le modèle RBF aux États-Unis en 2020, lorsque le marché était encore naissant. J’ai tout de suite été frappé par la pertinence de ce modèle data-based et ai lancé Silvr dans la foulée.
Silvr a récemment levé 130 millions d’euros en Série A, comment comptez-vous vous en servir ?
Lorsque l’on a commencé avec mon associé, nous avons déployé 1 million d’euros en fonds propres qui nous ont permis de financer une dizaine d’entreprises. En 2021 nous levons notre premier tour d’equity de 3 millions d’euros et sécurisons nos premières lignes de dette qui nous ont permis de constituer une équipe de 20 personnes et financer une centaine de clients. Grâce à cette trajectoire, nous réalisons seulement quelques mois après une Série A de 18 millions d’euros en equity et 112 millions d’euros de dettes. Notre ambition, atteindre plusieurs centaines de clients et constituer une équipe d’une centaine de personnes pour fin 2022.
Avec l’ambition maintenant de devenir à votre tour une licorne ?
Ce n’est pas tous les jours qu’on a la possibilité de créer un leader européen. Aujourd’hui, Silvr tient la place de n°1 en Europe car nous avons le plus grand nombre de clients, nous avons sécurisé la plus importante capacité de financement, et nous avons embauché les meilleurs talents pour opérer. Nous souhaitons aider des dizaines de milliers d’entrepreneurs européens à financer leur activité de façon rapide, sans contrainte et de manière scalable.
Ce modèle existe-t-il ailleurs ou êtes-vous les premiers ?
Le RBF existe depuis quelques années aux États-Unis. Quand on a démarré début 2020, c’était émergent aux US et inexistant en Europe. Aujourd’hui, c’est en plein boom aux États-Unis et c’est émergent en Europe. Nous avons 2 ans d’avance par rapport aux autres acteurs européens.
De nombreux étudiants en grandes écoles se lancent dans l’entrepreneuriat et sont donc confrontés au besoin de lever des fonds. En quoi Silvr pourrait les aider ou les accompagner ?
Les financements que nous produisons sont non-dilutifs, c’est-à-dire qu’on ne prend pas de parts au capital. Nous sommes beaucoup plus rapides qu’une banque puisqu’on est sur un financement en 24 heures. La seule condition requise est un minimum d’activité : c’est-à-dire que l’entreprise existe depuis au moins 6 mois et fasse minimum 100 000€ de chiffre d’affaires annuel. A partir de là, nous avons suffisamment de data pour évaluer la performance passée de l’entreprise, projeter son potentiel futur et apporter des financements tout de suite.
Aujourd’hui, on a une vingtaine de nouveaux clients par mois et on a plus de demandes que de financements réellement possibles.
Peux-tu nous décrire une de tes journées-type ?
Tous les lundis matin, je fais une review avec les équipes : on fait un update de la semaine précédente et on explique ce qu’on prévoit pour la semaine à venir. Ensuite, j’ai des rituels tous les après-midis avec les managers qui s’occupent du recrutement, des partenariats, du produit, des finances, etc. Par exemple, tous les jeudis après-midi, je fais un point avec l’équipe produit. D’un point de vue tech, je ne code plus depuis longtemps, mais j’ai tout de même une sensibilité forte au produit et à l’expérience utilisateur.
Ce produit justement, comment fonctionne-t-il ?
Nous avons développé une plateforme de scoring qui repose sur les données que génèrent les entreprises : les entreprises se digitalisent de plus en plus, par exemple pour acquérir de nouveaux clients grâce au marketing en ligne ou pour vendre leur produit ou leur service comme en e-commerce par exemple. Ce faisant, elles génèrent de manière naturelle de plus en plus de data. Ces données sont des sources de vérité qui nous renseignent sur la performance des entreprises et nous permettent de proposer à chacune le financement le plus adapté pour maximiser sa croissance.
Qu’est-ce-qui te plaît le plus dans ton métier ?
Concevoir des modèles de financement qui répondent aux enjeux des entreprises d’aujourd’hui et permettre à des dizaines de milliers d’entrepreneurs en Europe d’accéder à un financement plus rapide et surtout plus juste.
Quelles sont les plus grosses difficultés que tu as rencontrées depuis la création de Silvr ?
Le lancement d’un modèle innovant est toujours difficile : trouver tes premiers clients, te créer une image de marque, exister sur la scène tech. Personne ne t’attend sur le marché, il y a des centaines d’autres personnes qui ont eu la même idée que toi, la complexité réside dans la mise en marche de ton idée. C’est passer de 0 à 1. Il faut ensuite savoir accélérer très vite pour conserver une longueur d’avance sur la concurrence.
Quel conseil donnerais-tu aux étudiants qui souhaiteraient se lancer dans l’entrepreneuriat ?
Je pense qu’il faut en discuter un maximum autour de soi, garder une idée ou une intention pour soi est toujours un mauvais réflexe. Il faut en parler rapidement à des clients potentiels, récolter leurs avis et construire quelque chose qui est attendu par le marché. Il faut répondre à un besoin. Après, il faut se lancer !
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